mercredi 24 octobre 2007

Massacre au nord Niger

8 octobre 2007

Le 1er octobre, nous avons appris qu’une patrouille de l’armée nigérienne FAN (Forces armées nigerien) a arrêté dans la région à l’extrême nord du Niger, cinq (5) véhicules qui circulaient en direction du nord, et forcé les passagers de descendre. Les soldats de la FAN ont ensuite séparé les passagers de peau sombre de ceux de peau claire, qui étaient probablement présumés touaregs.

Les soldats de la FAN ont ensuite fusillé ces dernières personnes de peau claire.

Un jour après cet incident, les mêmes soldats de la FAN ont appréhendé, dans une région plus au sud entre Assamakka et Arlit, 17 touaregs dans leurs tentes, et les ont également fusillé ensuite – sans aucune raison, dans l’arbitraire total.

Selon des informations du MNJ (Mouvement des Nigériens pour la Justice), ces personnes n’appartenaient pas au mouvement d’opposition armé.

Toutes les personnes fusillées ne se trouvaient, au moment de l’incident, impliqués dans aucune action de combat. Il n’existe aucun jugement ou inculpation contre eux.

Avec ces faits, la FAN et le gouvernement de la République du Niger transgressent de nouveau la Convention de Genève et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.

Du côté des médias, le journaliste Moussa Kaka de Radio France Internationale (RFI) se trouve toujours en détention au Niger. Il avait informé sur le conflit actuellement en cours au nord du pays et pour cela, entretenait des contacts entre autre dans les rangs du MNJ. Ceci lui était ensuite rapproché par le gouvernement nigérien. Cependant, cette incarcération représente une violation de la liberté de presse. L’organisation des Reporters sans Frontières (RSF) s’engage, entre autres organisations, pour la libération du journaliste.

Des « bandits » charitables et un président non compréhensif

25 septembre 2007

Situation au nord Niger de plus en plus critique

Suite au minage de diverses régions autour de villes et de villages dans la région du nord (dont surtout Iférouane), la population civile se retrouve fortement restreint dans sa mobilité. Les livraisons alimentaires sont partiellement impossibles, des vivres de plus en plus rares sont proposés en vente à des prix exorbitants, le ravitaillement de base est le plus souvent insuffisant. Par conséquence, beaucoup de personnes et familles fuient les régions du nord en direction du sud.

État d’urgence pour la région d’Agadez

Entre temps, le président de la République du Niger Mamadou Tandja, a déclaré en fin août un état d’urgence de la durée de trois (3) mois dans le Département d’Agadez. Avec ce pas, l’armée nigérienne a la main libre de regagner le contrôle sur les agitations persistantes depuis sept (7) mois déjà. Les méthodes adoptées à cette fin sont cependant douteuses. Depuis l’application de la loi de l’état d’urgence, plus de 100 personnes ont été arrêtées temporairement, dont au minimum 10 personnes se trouvent toujours en détention sans inculpation aucune et sous des conditions inhumaines.

Ce qui est d’autant plus inquiétant, c’est le fait qu’il s’agit là de personnes qui s’engagent pour un dialogue entre le gouvernement et le MNJ (Mouvement des Nigériens pour la Justice) ou qui communiquent sur les évènements au nord Niger.

L’arrestation, respectivement la détention dans une garde militaire ou policière, de civils non impliqués dans le conflit armé, ces faits remplissent l’état de fait de la « arbitrary detention » (= détention arbitraire) et représentent ainsi une violation de l’article 9 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Amnesty International a condamné ces arrestations arbitraires avec la plus grande sévérité.

Restriction persistante de la liberté de presse

Le 20 septembre 2007, le correspondant nigérien de Radio France Internationale (RFI) a été arrêté pour cause d’avoir, à plusieurs reprises, diffusé des reportages sur le conflit. Suite à sa couverture du conflit au nord du pays, Radio France Internationale (RFI) a déjà été assujetti, en juillet 2007, à une interdiction d’émission d’un (1) mois sur le territoire nigérien. La chaîne a pu reprendre ses activités au Niger que le 20 août 2007.

L’association Reporters sans Frontières (RSF) s’engage pour la libération de Moussa Kaka et informe sur d’autres violations de la liberté de presse et –d’expression. La région du nord Niger est cependant toujours bloquée pour les journalistes nationaux et internationaux.

Accrochages entre le MNJ et la FAN (Force Armée Nationale)

Entre temps, les dernières semaines ont apporté plusieurs accrochages entre l’armée nigérienne (FAN) et des membres du MNJ, ce qui a mené à des pertes humaines sur les deux côtés.

Pour encourager le régime du Niger de rentrer dans des négociations avec eux, le MNJ a, à plusieures reprises, remis des soldats nigériens, qui avaient été faits prisonniers lors d’attaques précédentes, entre les mains du Comité International de la Croix Rouge (CICR).

De plus lors du début du Ramadan en mi-septembre, les prisonniers de l’attaque de Tezirzayt en juin de cette année, ont également été libérés.

Simultanément, le MNJ a annoncé un armistice de son côté durant la période du Ramadan. Face à cette déclaration, aucune position a été prise de la part du gouvernement.

La politique de communication de Tandja

En dépit du fait que le président Mamadou Tandja parle toujours de bandits et de trafiquants de drogue, il a demandé la Libye voisine pour l’aider dans la médiation avec les rebelles. Le rôle du président libyen Muammar Ghadafi demeure cependant opaque. En fin août, Ghadafi a porté plainte contre trois journaux indépendants à Niamey qui l’avaient présenté en tant que souteneur du MNJ. En même temps, Ghadafi est accusé de prétendre à des intérêts territoriaux et des richesses minières au Niger. Malgré tout, Tanja semble investir son espoir dans la médiation par les gouvernements de la Libye, du Sudan et de l’Algérie pour trouver une solution à ce conflit, plutôt que de négocier directement avec le MNJ.

Le Niger, les touaregs et l’uranium

Entre temps, le gouvernement du Niger vient, pour la première fois, de vendre de l’uranium directement et indépendamment sur le marché mondial. Jusque là, la société minière française AREVA possédait le monopole au Niger, mais après une crise la société s’est trouvé contrainte de faire des concessions vis-à-vis du gouvernement nigérien. En attendant, le président français Sarkozy a exigé que l’utilisation du profit de ce commerce minier soit rendue transparente.

L’exploitation des ressources du sous-sol, en particulier des ressources uranifères au nord Niger, ses risques environnementaux et la question de la prise de part économique des populations riveraines, est l’une des causes fondamentales pour le conflit actuel.

Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones adoptée

Dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qui a été adoptée par l’assemblée générale de l’ONU le 13 septembre 2007, le MNJ est renforcé dans ses efforts.

L’importance de la Déclaration s’explique par le fait qu’elle admet aux peuples indigènes – parmi lesquelles sont comptés les touaregs, aussi pour leur contribution importante dans l’édification de la Déclaration – explicitement le droit d’autodétermination et respecte leur droit sur les ressources du sous-sol dans leurs terrains traditionnelles de résidence.

Situation tendue au Mali

En attendant, des évènements inquiétants se produisent également dans le nord du pays voisin, le Mali. Depuis fin août, plusieurs accrochages sanglants ont eu lieu dans la région de Kidal, entre l’armée malienne et des touaregs issu de l’entourage du chef Ibrahim Ag Bahanga.

Les causes de ces accrochages s’avèrent quelque peu familiers. Comme au Niger, il s’agit de la réalisation des accords de paix de 1995, de plus amples projets de développement pour le nord et d’une prise de part plus égalitaire des régions du nord dans le profit issu du commerce minier.

Tandis qu’une collaboration entre le MNJ et Ag Bahanga n’est pas avérée, les gouvernements du Mali et du Niger vont collaborer sur leurs frontières pour regagner le contrôle sur le soi-disant « banditisme » et « trafique de drogue ».

Contraire au gouvernement nigérien, le Mali se montre cependant prêt au dialogue. Des dirigeants rebelles des rebellions des années ‘60 et ’90 se trouvent depuis mi-septembre impliqués dans des négociations entre le gouvernement et Ag Bahanga. Le Mali vient de faire les premières concessions dans le secteur de la répartition des fonds de développement. L’Algérie a également annoncé son soutien pour des projets de développement au nord du Mali. L’armée malienne souhaite à présent temporiser et renoncer pour l’instant à des nouvelles contre-attaques.

Ibrahim Ag Bahanga a réagi de manière compréhensive et a libéré des soldats prisonniers. De plus, un cessez-le-feu a pu être négocié. Il reste à voir si cela va aboutir à la stabilisation de la situation malienne.

Le gouvernement continue sur la voie de la confrontation

16 août 2007

De nouveaux civils sont arbitrairement arrêtés par l’armée nigérienne dans le Département d’Agadez, leurs familles demeurent sans leurs nouvelles depuis. Entre-temps, selon des rapports concordants de civils et de combattans touaregs, des mines antipersonnelles ont été découverts dans les alentours d’Iferouane.

Dans les dernières semaines, de nouveaus sympathisants du MNJ (Mouvement des Nigériens pour la Justice) ont déserté les rangs de la FAN (Force Armée Nigerien) et de la FNIS (Force Nationale d’Intervention et de Sécurité), pour rejoindre le mouvement rebelle. En mai, des soldats de la FNIS chargés de surveiller un site minier de la société française AREVA à Imouraren, ont déserté leurs postes et rejoint le MNJ avec leur solde et leurs armes.

Suite à ceci, le gouvernement nigérien a accusé AREVA de soutenir le MNJ, respectivement la rébellion touarègue, accusations qui atteignaient leur comble dans l’expulsion de M. Dominique Pin, le représentant d’AREVA au Niger. En fin juin, M. Gilles Denamur, expert de sécurité auprès d’AREVA, a été déjà expulsé du pays pour avir été un complice dans la rébellion touarègue de 1990-1995 – toujours selon le gouvernement.

AREVA a démenti ces accusations àplusieures reprises. Le 27 juillet, le Président français, Nicolas Sarkozy, s’est interposé en pressant pour une solution rapide de l’affaire. Après des entretiens ayant eu lieu par la suite entre les gouvernements des deux pays et AREVA,le Niger a prolongé les contrats avec la société minière AREVA, qui détient actuellement le monopole au Niger. Le nouveau contrat améliore les conditions pour le gouvernement nigérien de manière très nette.

Considéré que le gouvernement nigérien ne maîtrise toujours nullement les mouvements rebelles dans le nord du pays, il a plusieures reprises demandé le soutien des pays voisins dans ses démarches contre le MNJ. Président Mamadou Tandja continue cependant de minimiser la rébellion en la dénominant en tant que « banditisme armé » et « trafic de drogue », ce qui à rendu impossible toute négociation jusqu’à ce jour. En mi-juillet, le Burkina Faso a signalé son ouverture à jouer un rôle de médiateur dans le conflit entre les rebelles et le gouvernement, comme il l’avait déjà accompli avec succès dans les négociations de paix lors de la rébellion précédente.

Le 15 juillet 2007,le MNJ a annoncé le fondement d’un bureau politique qui a pour but d’atteindre la grande diaspora touarègue dans lemonde occidental, de construire des représentations et des relations internationales, et de coordonner des actions de donations.

Le MNJ signale après comme avant son ouverture au dialogue. Ceci a été de nouveau souligné par la libération, le 5 août, de six (6) soldats qui ont été faits prisonniers lors de l’attaque sur Tezirzayt, en juin passé.

Pour renouveler l’accent sur leurs exigeances, le MNJ a attaqué, dans la nuit du 9 au 10 août, une centrale éléctrique approvisionnant des sites minières d’AREVA, ainsi qu’un entrepôt de carburant de la FAN à Agadez. Dans l’affrontement entre le MNJ et la FAN qui suivait l’attaque, deux (2) civils ont trouvé la mort par des projectiles de l’armée nigérienne.

Nouvelle rébellion touarègue: hypothèques du passé?

20 juillet 2007

Depuis février de cette année, de nouvelles agitations secouent le nord de la République du Niger. Déjà, de diverses sources font état de nombreux morts – dont des civils – et de portés disparus. Des conflits non résolus vont-ils mener à une nouvelle édition des évènements de 1990-95 ?

De nombreux touaregs issu du milieu de la rébellion touarègue des années ’90 se sont formés en nouveau front avec le nom Mouvement des Nigériens pour la Justice (MNJ), en février passé. Depuis, plusieurs affrontements armés entre l’armée nigérienne et le MNJ ont eu lieu. D’autre part, des infrastructures commerciales de provenance étrangère ont été attaquées à plusieurs reprises, comme il est le cas de la société minière française Areva.

L’arrestation et l’assassinat de trois vieillards civils touaregs par le militaire dans la région de Tezirzayt (faits entre temps confirmés par plusieurs sources, dont militaires au Niger), ainsi que des informations selon lesquelles plus de 250 personnes seraient portées disparues après des arrestations, ont entraîné le conflit vers l’escalade. En tant qu’attaque de représailles, les rebelles du MNJ ont attaqué le poste militaire avancé de Tezirzayt, ce qui a causé la mort de 17 soldats nigériens, 43 autres ont été blessés et plus que 70 ont été fait prisonniers. A l’issue de l’attaque, le MNJ a fait appel au Comité International de la Croix Rouge (CICR) pour la prise en charge des prisonniers blessés. Le 25 juin, 30 des plus grièvement atteints ont été libérés et remis a une délégation du CICR pour les conduire à l’hôpital d’Arlit.

En dépit de l’attention internationale, que ces évènements ont attirés au cours de ces dernières semaines, le gouvernement nigérien continue de qualifier les rebelles de « bandits armés » et « trafiquants de drogue ». Il refuse d’admettre l’existence d’une nouvelle rébellion touarègue et leur organisation MNJ, qui – selon le site internet du mouvement – s’engage pour que justice soit faite à tous les nigériens, toutes ethnies confondues. Conformément à ce crédo, de nombreux individus non-touaregs ont rejoint les rangs du MNJ.

En plus du refus du gouvernement d’admettre une nouvelle rébellion, la presse est soumise à une censure active : le 1er juillet, le bimensuel indépendant d’Agadez, Aïr Info, a été suspendu pour 3 mois pour ses articles sur les évènements. Trois autres journaux privés de Niamey ont été mis en garde.

Les rebelles touaregs ont signalé à plusieures reprises leur ouverture au dialogue avec le gouvernement, mais sous condition que celui-ci accepte leur organisation MNJ en tant que mouvement rebelle.

Plusieurs fois, des informations (jusque-là non confirmés pourtant) ont circulé, selon lesquelles le gouvernement nigérien aurait demandé le soutien militaire d’autres pays. Le dernier cas a été cité par le MNJ le 3 juillet sur son site internet, stipulant que le Président Mamadou Tandja voulait se procurer des hélicoptères du type M-24 de l’Ukraine pour attaquer les postes du MNJ.

Les raisons pour le conflit sont à chercher dans la discrimination persistante des régions du nord, ainsi que dans l’exploitation et prospection des importants gisements uranifères dans l’Aïr (surtout par des sociétés françaises et chinoises), qui représentent un danger de santé pour la population locale et pour l’environnement. Sous la médiation de la France, de l’Algérie et du Burkina Faso, le dernier soulèvement armé des touaregs a été achevé en 1995 par des accords de paix entre les rebelles et le gouvernement. Cet accord prévoit, entre autre, une décentralisation administrative et militaire du pays entier, ainsi qu’une augmentation des investissements dans la région du nord, surtout dans le secteur éducatif et la médicalisation de base. D’autre part, certains droits d’autogestion ont été accordés aux populations du nord, majoritairement composées de touaregs. Selon le MNJ, ces promesses, faites dans les accords de paix de 1995, n’ont été tenues que ponctuellement ou pas du tout par le gouvernement.